Exposition virtuelle

La Confédération générale des SCOP et des SCIC, une histoire en mouvement

L' AOIP, une success story (1896-2003)

Conscients et fiers de leur appartenance au mouvement coopératif, les sociétaires des Scop ont largement contribué à documenter l’activité de leur entreprise au fil du temps : photographies, documents administratifs, discours, publicités, journaux et brochures, témoignent d’une volonté de contribuer au grand récit historique de l’émancipation du monde ouvrier.

Grâce à la bonne conservation de certaines de ces archives, il nous est aujourd’hui possible de retracer l’histoire de coopératives dont certaines font preuve d’exemplarité, à l’image de l’Association des ouvriers en instruments de précision (AOIP).

L'Association des Ouvriers en Instruments de Précision (AOIP), "1896-1937, 40 ans de précision", archives de la CGSCOP.

Peu de temps après la création de la Chambre consultative des AOP en 1884 (voir chapitre 1), 80 membres de la Chambre syndicale des ouvriers en instruments de précision de Paris envisagent, pour se libérer du patronat capitaliste, de compléter leur engagement syndical en ouvrant un atelier coopératif. Le 10 mars 1896, la création de l'AOIP (association des ouvriers en instruments de précision) et son adhésion à la Chambre consultative des AOP, sont votées en assemblée générale.

Association des Ouvriers en Instruments de Précision (AOIP), extraits des statuts adoptés à l'Assemblée générale du 08 décembre 1895, archives de la CGSCOP.

Comme toute jeune entreprise, l’AOIP doit s’outiller et remplir son carnet de commandes pour faire vivre des ouvriers-associés qui peinent à se rémunérer dans les premiers temps.

Avec l’apparition récente du cinématographe, l’AOIP entrevoit de nouvelles opportunités et s’associe avec l’ingénieur Ernest Normandin pour industrialiser la fabrication d’un appareil réversible de prise de vue et de projection, dans l’espoir de concurrencer le système des frères Lumières. Malheureusement, le projecteur sera à l’origine du tristement célèbre incendie du Bazar de la Charité du 4 mai 1897 où il était exposé au grand public, et conduira l’AOIP au bord de la faillite.

"Incendie du Bazar de la Charité : le sinistre", Une du supplément illustré du "Petit Journal" du 16 mai 1897, gravure de Fortuné Méaulle (d'après un dessin d'Osvaldo Tofani), Bnf, Gallica.

Grâce à un fonds de soutien ministériel et à des commandes publiques conséquentes, notamment de la part de l’administration des PTT (Postes, Télégraphes et Téléphones), l’activité démarre pour de bon et pourra se stabiliser dans les années 1910, avec une augmentation significative du nombre d’ouvriers-associés et des conditions de travail plus favorables dans les locaux de la rue Charles Fourier, à Paris.

"Si l'AOIP m'était contée... 1896-1996", Atelier Télécom, archives de la CGSCOP.

Dans le récit historique que l’AOIP fait d’elle-même, on perçoit que la gouvernance coopérative et syndicale a joué un rôle prépondérant dans sa capacité à traverser les périodes les plus difficiles. Elle ne cesse de rendre hommage, notamment par son slogan « Courage et Travail », à l’engagement des travailleurs qui ont dû, à de nombreuses reprises, supporter les efforts nécessaires à la survie de l’entreprise.

Cet engagement du collectif pour le collectif, est également très présent dans le choix d’instaurer, dès la signature des statuts de mars 1896, un programme d’œuvres sociales au bénéfice des ouvriers eux-mêmes.

C’est donc quelques années avant la loi du 5 avril 1910 sur les retraites ouvrières et paysannes, que l’AOIP constitue une caisse de retraite pour les travailleurs de la coopérative. 10% des bénéfices de la société sont affectés à un compte retraite et un principe de « retraite anticipée » est admis pour les ouvriers dont l’état de santé ne permet pas une cotisation intégrale.

En cas de maladie ou d’accident du travail, une caisse de solidarité est également mise en place dès les débuts de l’AOIP. Face aux circonstances, elle sera aussi utilisée pour venir en secours aux mobilisés, aux prisonniers et aux déportés et leurs familles durant la guerre de 1914-1918.

Enfin, afin de compléter une instruction publique jugée imparfaite, et assurer la transmission des savoir-faire de l’AOIP aux générations futures, celle-ci souhaite offrir à la jeunesse une formation complémentaire d’apprentissage en mécanique de précision. Sous l’impulsion du Président de l’AOIP Edmond Briat (également Secrétaire général de la Chambre consultative des AOP de 1907 à 1940), ce projet comportant un volet d’enseignement général et un volet pratique de spécialisation, est validé par l'Assemblée générale du 17 mai 1914. La première classe est accueillie en 1917 et à partir de 1919, les élèves doivent se présenter aux examens du certificat d'aptitude professionnelle pour obtenir une reconnaissance du ministère de l’Instruction publique.

"Si l'AOIP nous était contée... 1896-1996", École d'apprentissage, 1920, archives de la CGSCOP.

Cette histoire particulière de l’AOIP, qui a traversé plus d’un siècle d’évolutions politiques, sociales et technologiques, jusqu’à sa cessation d’activité en 2003, témoigne de caractéristiques propres aux coopératives qui n’ont cessé de s’adapter pour asseoir, aux côté des instances coopératives et syndicales représentatives, un modèle économique plus juste et émancipateur pour les classes ouvrières.

"AOIP, 1896-1937 : 40 ans de précision", 1937, archives de la CGSCOP.

"AOIP, 1896-1946", 1946, archives de la CGSCOP

"AOIP, soixante ans de haute précision", 1956, archives de la CGSCOP.

"Si l'AOIP nous était contée... 1896-1996", 1996, archives de la CGSCOP.

Livret d'accueil de l'AOIP

Livret d'accueil de l'AOIP, s.d., archives CGSCOP.

AOIP, à la pointe du progrès social et technique

"AOIP, à la pointe du progrès social et technique", 1976, archives de la CGSCOP.

Synergie, bulletin de liaison du personnel de l'AOIP

"Synergie, bulletin de liaison du personnel de l'AOIP", 1980, archives de la CGSCOP.

Synergie AOIP, mensuel du personnel de l'AOIP

"Synergie, mensuel du personnel de l'AOIP", 1981, archives de la CGSCOP.