Dans les coulisses du guide des sources du monde coopératif
Interview d'Emma Hillenstedt
A l'occasion de la publication du guide des sources du monde coopératif de la Fondation Maison de Salins, nous vous proposons de découvrir les coulisses de sa conception. Rencontre avec Emma Hillenstedt, archiviste en formation qui a mené à bien ce chantier d'importance pour la communauté des chercheurs en Histoire contemporaine.
Bonjour Emma Hillenstedt, pouvez-vous présenter en quelques mots votre mission à la Fondation Maison de Salins?
Je suis actuellement étudiante en Master 2 en archivistique à l'Université de Haute-Alsace à Mulhouse. Souhaitant devenir archiviste, j'ai choisi d'effectuer mon stage de fin d'études à la Fondation Maison de Salins, qui proposait une mission particulièrement intéressante : la conception, la réalisation et la diffusion d'un guide des sources du monde coopératif.
Je n'avais pas de connaissance particulière du monde coopératif, mais j'apprends beaucoup de cet univers et de ces organisations sociales en explorant les ressources archivistiques disponibles.
En parallèle, je rédige un mémoire en lien avec ce stage, comportant à la fois des problématiques pratiques et de recherche. Cette expérience est donc globale et très formatrice pour entrer dans la vie professionnelle.
En quoi consiste ce guide des sources du monde coopératif sur lequel vous travaillez, et à qui s'adresse-t-il?
Un guide des sources est un instrument de recherche, une sorte de répertoire qui référence des archives liées à un sujet spécifique. Ces archives sont physiquement localisées à divers endroits du territoire français ; le guide a pour fonction de les recenser, les référencer et les agréger sur un portail unique, pour faciliter le travail des chercheurs. Ces derniers peuvent ainsi identifier et localiser facilement les documents qui leur seront utiles pour leurs travaux. A leur charge ensuite de contacter les centres d'archives concernés pour les consulter, soit en ligne si elles sont numérisées soit en salle de lecture.
Pour compléter l'outil, une cartographie des sources sera prévue pour de futures mises à jour. A un premier niveau, cette carte du territoire indiquera les lieux de conservation d'archives en lien avec le monde cooopératif.
Pour un second niveau d'information, la carte affichera l'emplacement des sièges sociaux des entreprises coopératives, pour un aperçu de leur répartition sur le territoire. Ce sera particulièrement utile aux personnes qui effectuent des recherches sur une localité ou une région précise.
Et enfin, une troisième carte sémantique affichera des données croisées, dont les modalités restent encore à déterminer. En un coup d'oeil, on pourra voir apparaitre les données qui nous intéressent et desquelles pourront ressortir des tendances ou des agglomérats qu'il aurait été difficiles d'identifier en interrogeant simplement la base de données.
La version initiale du guide des sources du monde coopératif arrive en fin de développement et sera accessible dès juillet 2022 en ligne. Il s'agira d'un site annexe au portail des archives numérisées, leurs fonctions étant complémentaires mais les usages différents.
A quel besoins identifiés répond ce guide?
Le projet a été commandité par le Comité scientifique de la Fondation Maison de Salins, en réaction à un constat : il n'existait pas d'état des lieux des archives du monde coopératif ou de cartographie qui pourrait simplifier le travail des chercheurs.
Le guide des sources peut aussi devenir un outil pour engendrer de la collecte et de nouveaux partenariats pour la Fondation Maison de Salins, qui renforce son rôle dans la conservation et l'accès aux archives du monde coopératif.
Découvrir les membres du Comité scientifique
De manière pratique, comment avez-vous mené à bien ce projet?
J'ai commencé par lire la trame de travail conçue par Cathy Drévillon (madame papier), ma tutrice de stage, pour bien saisir les grandes lignes du projet et les attendus du Comité scientifique. Ensuite j'ai exploré une dizaine de guides de sources existants en ligne pour analyser leurs caractéristiques techniques et la méthodologie mise en place pour les réaliser. A partir de cet état des lieux, j'ai pris contact avec une vingtaine de personnes ayant participé à la réalisation de guides des sources en ligne et j'ai pu mener des entretiens oraux avec six d'entre elles. D'autres retours d'expérience me sont parvenus par email. J'ai synthétisé les retours d'expérience ainsi collectés pour formaliser une méthodologie propre au projet de la Fondation Maison de Salins.
Sur le plan technique, nous avons été aidés par des prestataires qui s'occupent du développement et de l'interface graphique (Sempiternelia, Miloeil) ; mon rôle a surtout consisté à formaliser les attendus dans un cahier des charges et à collecter les sources à référencer dans le guide. Les prises de contact ont été nombreuses avec les services d'Archives départementales pour pouvoir compléter les sources identifiées et ainsi assurer l'exhaustivité des sources publiques locales.
Avez-vous fait des découvertes intéressantes sur le monde coopératif au cours de cette mission?
Ce stage m'a fait découvrir le monde coopératif et ses valeurs, qui sont vraiment passionnantes. Ce qui m'a marqué, c'est le manque d'informations clés sur les sociétés coopératives dans les instruments de recherche des services d'archives : il manque fréquemment dans les notices les dates de création de la société, la localisation du siège social ou encore la date de dissolution.
Le brassage d'archives au cours de la collecte de sources m'a aussi fait découvrir des archives ... étonnantes! On s'écarte vite du sujet avec des archives de comités d'ufologie ou relatives à des séances d'exorcisme, mais c'est amusant et cela montre qu'explorer les archives est toujours source de surprises.
Une fois le guide mis en ligne, quelles seront les prochaines étapes?
Après la publication en ligne en juillet 2022, les retours d'utilisation des chercheurs et du Comité scientifique de la Fondation Maison de Salins permettront de faire progresser le guide dans le temps.
En plus d'une bibliographie, d'une table des sigles et des abréviations et d'index, qui paraitront dès la première version, le guide s'enrichira, au fil des mises à jour, d'outils complémentaires comme une cartographie et des articles du Comité scientifique. La possibilité d'accès à un compte personnel et des outils d'indexation collaborative seront également à l'ordre du jour.
Il faudra assurer également un travail de veille continue pour enrichir les sources avec divers types d'archives, notamment celles issues des services d'archives à vocation nationale, d'archives municipales, d'institutions spécialisées et centres de recherche. Les entreprises et certains acteurs du monde coopératif seront aussi sollicités pour retrouver et référencer des archives restées jusqu'alors oubliées.
A terme donc, le guide s'enrichira de nouvelles sources et de contenus éditoriaux actualisés. Il deviendra aussi un guide de recherche en apportant une orientation méthodologique dans les fonds pour permettre aux chercheurs d'étudier le monde coopératif.
Consulter le guide des sources du monde coopératif , sortie de la V1 à l'occasion de la journée internationale des coopératives
Interview réalisée le 10 juin 2022
